Claire Hédon, journaliste à RFI présente depuis 2003 une émission consacrée à la santé dans le monde :"Priorité Santé". Le but : faire de la prévention auprès du grand public, l’informer sur ses droits, sur les traitements et les moyens d’y accéder.
Vous avez choisi de nous parler de la pilosité sexuelle féminine. C’est pourtant un sujet plutôt léger...
Ecouter la chronique du Dr Catherine Solano:
Catherine : Oui, et même si cela semble superficiel de parler des poils, c’est un sujet très intime qui soulève beaucoup de passions ! Surtout entre les « antipoils » qui veulent traquer le moindre poil et les partisans de la femme naturelle qui conseillent de garder tous les poils sans exception.
Claire : Actuellement, j’ai l’impression que les poils sont plutôt considérés comme devant être épilés...
Catherine : C’est vrai que de plus en plus, nous vivons une sorte de « révolution antipoils » féminins (et masculins aussi d’ailleurs). On entend des personnes dire que les poils « ça ne fait pas net, pas propre », ou même que « ça sent mauvais ». Il y a quelques années, les femmes gardaient leurs poils sous les aisselles alors qu’aujourd’hui, on imagine beaucoup moins de mettre une robe sans manche et de garder des poils. Et pour la pilosité intime, c’est pareil, les gynécologues sont surpris de voir que de plus en plus de jeunes filles s’épilent le sexe et cela intégralement, ce qui n’est pas le cas dans les générations à peine plus âgées.
Claire : à quoi sont dus ces changements ?
Catherine :
1 - Nous nous éloignons du naturel, de l’animal, et nous allons vers l’artificiel. Les femmes sont maquillées, désodorisées, parfumées, siliconées, botoxées, liftées, et bien sûr, épilées…
2 - C’est aussi une question commerciale. Le marché de la cosmétique est en pleine expansion planétaire et derrière chacun de ces actes, il y a des choses à vendre. Pour l’épilation, il s’agit de rasoirs, de la cire, de la crème dépilatoire, de formes pour s’épiler le pubis en forme de cœur par exemple, de crèmes après épilation...
3 – On doit aussi cette allergie aux poils à la pornographie. Les seuls sexes féminins que l’on peut voir sont ceux des films X. Or pour que le consommateur puisse voir le mieux possible, on enlève les poils. Du coup, cela devient un modèle. Une jeune fille de 15 ans qui m’a demandé « Comment faire pour avoir le sexe aussi joli qu’une actrice X ? ». Et un garçon m’a déjà écrit « Ma copine n’est pas normale, elle a des poils autour du sexe... ». La pornographie est devenue une référence chez les plus jeunes qui ont accès à Internet.
4 – Certaines personnes posent à propos des poils la question de la libération et de l’égalité des femmes avec les hommes. En gros, pendant que les femmes s’épilent, se maquillent, s’occupent de leur corps, elles ne passent pas leur temps à être en concurrence professionnelle avec les hommes !
Claire : Est-ce que finalement, on ne devrait pas se dire « chacun fait ce qu’il veut avec son corps »...
Catherine : Bien sûr et heureusement. Mais ce qui se produit, c’est que nous sommes sous influence et qu’on choisit souvent sans y réfléchir. Vous savez, aujourd’hui, en France, une femme qui ne s’épile pas sous les aisselles par exemple, se fait traiter de souillon, de négligée, de feignasse... Pourtant, s’épiler n’est pas spécialement propre. On a montré qu’avant intervention chirurgicale sur le bas ventre, il y avait moins d’infections si on ne s’épilait pas ou si on ne se rasait pas. Car chacun de ces gestes produit des microcoupures ou effractions cutanées qui augmentent le risque d’infections.
Claire : Finalement, en pratique, à quoi servent les poils sexuels ?
Catherine :
- Ils servent à hydrater la peau. Car à la base de chaque poil se trouve une glande sébacée. Si vous arrachez le poil, vous arrachez aussi la glande et votre peau devient plus sèche et plus irritable. D’où l’augmentation des mycoses et irritations dans un endroit plutôt naturellement fragile.
- Les phéromones, hormones du désir et de l’attirance sexuelle sont aussi fabriquées à la racine des poils. Quand on s’épile, on perd cet échange d’odeurs délicieuses, d’autant que le poils retient ces odeurs aphrodisiaques...
- Et puis, le poil véhicule des sensations. Quand vous les arrachez, vous avez une anesthésie passagère de la zone qui est agressée.
Claire : Et sur le plan esthétique est-ce que le sans poil, c'est plus joli ?
Catherine :
Pour ceux qui sont calibrés par le X, c’est possible.
Mais autrement, et pendant longtemps, ça a été le contraire. Une femme sans pilosité pubienne était une vieille femme et ne pouvait faire rêver personne. Après la guerre 39-45, on a tondu non seulement des cheveux, mais des poils pubiens aux femmes que l’on voulait rendre repoussantes !
Et puis, une femme sans pilosité peut aussi être une petite fille non pubère, ou une poupée. C’est pourquoi on considère parfois que se sentir repoussé par les poils pubiens signifie que l’on n’aime pas la femme adulte sexuellement, une femme qui ressent du désir, qui a des hormones et qui le montre dans son corps.
Claire : Et les poils masculins ?
Catherine : L’épilation masculine. Il semblerait qu’aux USA, 30 % des hommes de 18 à 34 ans s’épilent le dos, la poitrine ou les jambes !
Claire : Vous m’avez même dit qu’il existe des personnes qui militent pour sauvez les poils !
Catherine : Oui, je trouve ça à la fois amusant et intéressant. Il existe un mouvement, le Mouvement International pour une Ecologie Libidinale ou le MIEL qui prend position pour les femmes naturelles, c’est-à-dire les femmes qui gardent tous leurs poils sans exception ! Ils proposent tous les ans un été sans épilation...
http://www.ecologielibidinale.org/fr/ese/miel-com5ese-fr.htm
Et des témoignages de femmes qui ne s’épilent pas !
http://www.ecologielibidinale.org/fr/ese/miel-temoignagesESE-fr.htm
Pour le site internet :
La pilosité sexuelle, à quoi sert-elle ?
- Elle sert à disperser la chaleur. Les poils se trouvent dans des endroits où l’on a chaud. Les gouttelettes de transpiration sont guidées par les poils pour diffuser et rafraîchir la zone.
- Elle sert à aérer. Entre les poils, l’air circule !
- Elle sert à hydrater la peau. En effet, le sébum est produit par des glandes situées dans les racines des poils. C’est donc par le même pore que sort cette substance hydratante. La peau est donc plus souple. Sans poils, elle se dessèche beaucoup plus. Elle diminue le risque d’irritations et de mycoses.
- La pilosité a aussi pour rôle de diffuser les phéromones, odeurs érogènes. Quand on arrache les poils, on se prive de ce plaisir de l’odeur intime de l’autre.
Pourquoi alors a-t-on tendance à vouloir l’arracher ou la raser ?
- L’épilation est un marché qui rapporte de l’argent. Crèmes dépilatoires, rasoirs et leurs lames, cire, rendez-vous avec l’esthéticienne...
- Les aisselles épilées sont une norme véhiculée par le cinéma. Les poils sous les bras ont commencé à être interdits aux USA dans les films car ils évoquaient la pilosité pubienne. C’est à ce moment que les actrices ont commencé à s’épiler.
- L’épilation pubienne est en train de gagner du terrain avec l’influence grandissante de la pornographie. Les actrices X sont épilées afin, dit-on que le spectateur puisse en voir le plus possible.
- L’idée fausse que les poils sont sales et sentent mauvais. C’est faux parce que l’épilation ou le rasage produisent des saignements ou des microsaignements qui sont plutôt sources potentielles d’infections.
Un conseil : Femme ou homme, faites très attention à ne jamais échanger un rasoir car il existe un risque de transmission du sida.
Claire Hédon, journaliste à RFI présente depuis 2003 une émission consacrée à la santé dans le monde :"Priorité Santé". Le but : faire de la prévention auprès du grand public, l’informer sur ses droits, sur les traitements et les moyens d’y accéder.
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