- d’abord, les petits garçons se projettent en héros légendaire dans les contes, un jour, quand ils auront ôté leur appareil dentaire, ils seront reconnus par le monde entier.
- ensuite l’histoire plante que ce ne sont pas des jalousies vis à vis du père qui empêche de vivre seul avec la mère, mais un monstre qui crache du feu, c’est moins lourd à porter.
- Et surtout : ce n’est pas profondément avec sa mère qu’il veut vivre toute sa vie, mais avec une créature merveilleuse qu’il ne connaît pas encore mais qu’il lui est destiné.

Pour les petites filles aussi, ce n’est pas la mère dont elles ont besoin au quotidien finalement qui empêche de vivre en tête en tête avec le père. Alors les récits symbolisent le côté obscur de la mère par une figure féminine redoutable : la fameuse marâtre. Et le père toujours dépeint comme bon, ne peut se porter au secours de sa ravissante fille, il faut donc bien un héros pour le faire à sa place.

CLAIRE : ON EST EN PLEIN FANTASME ALORS …

Oui, ce qui permet à l’enfant de construire un schéma du couple passant du parent à la love story. Le conte se termine sur l’annonce de siècles de bonheur sans nuages,
Même parfois avec une bande de marmots exemplaires qui n’usent jamais leurs parents.

Les émotions suivantes sont donc liées à l’utopie, au fantasme, au plaisir, à la délectation, se veulent rassurantes pour accepter de grandir.

CLAIRE : LES ENFANTS REVENT DE FAMILLE ?

En réalité, pas du tout. Bruno Bettelheim souligne que cette vision idyllique néglige la vision de l’enfant d’un monde paradisiaque qui n’inclut pas de biberons, de langes et de garderie. Ou alors uniquement par la force de l’amour, et sans sexe. Là, les émotions sont empreintes de chantilly, d’égoïsme, de naïveté, et d’un tel lâché prise qu’on peut enfanter sans s’en apercevoir.

CLAIRE : ADOLESCENT ? ca donne quoi ?

La régie nationale de la santé et des services sociaux de Montréal présentait un rapport en 2000 qui met en lumière une vision du couple très pragmatique :
les filles se sentent en charge de la résolution des conflits, des activités communes et d’un attachement pérenne, alors que les garçons « financent » … même si les adolescents rêvent d’un partage plus équilibré dans le couple, les deux émotions qui transpirent dans cette étude sont la peur et la frustration. Ça devient donc beaucoup moins glamour.

CLAIRE : ET APRES C’EST LA RENCONTRE DECISIVE … ?

Oui, après on passe à la grande histoire d’amour et jacques demy a fait tout ce qu’il a pu pour nous mettre en garde dans peau d’âne :

Même si le dragon est hors jeu, le poids parental pèse lourd dans le couple. C’est un florilège d’émotions riantes qui surgit : chagrin, déception, incompréhension, doute et agacement sont inévitables. Là, la psychologue Brenda Shoshanna, auteure du Zen et l’art de tomber amoureux, propose de profiter de la colère, parce que dialoguer c’est bien, en venir aux mains, c’est mal, mais dire ses griefs et ses frustrations avec force : c’est idéal.

Vous avez reçu Claire, la semaine dernière Frederic Langet, auteur du livre « je me libère », qui propose d’aller consulter à ce moment là,

Psychologie Magazine s’est penché sur le rôle d’une thérapie : Si Pour le psychiatre Bernard Geberowicz, la démarche peut apporter de l’air dans le couple, pour la psychothérapeute Ginette Lespine : c’est souvent vécue par l’autre comme un échec au projet euphorique de la rencontre qui promet inconsciemment de résoudre toutes les blessures …d’un seul baiser !

CLAIRE : QUELS EMOTIONS A CE MOMENT LA ?
les émotions qui se partagent, comme la joie, s’éteignent dans une distanciation qui ne laisse plus place qu’à l’ennui.
Emotion dévorante avec cette phrase gorgée de jalousie, d’amertume, et d’envie à l’attention de celui qui tente de grandir via un psy : « mais qu’est ce que tu peux bien lui raconter ???? »

Le sociologue Emile Durkheim évoquait l’importance du temps, comme élément central de la vie sociale, et donc aussi du couple. Suivre une psychothérapie tout seul quand l’autre n’est pas prêt par exemple. Parce que la particularité de l’espèce humaine est de tout régir par calendriers, horloges, et rituels. Ce que Willy Pasini reprends dans son livre le temps d’aimer, il écrit : « autrefois, il existait des rythmes préétablis pour la vie conjugale. La cour, la demande en mariage, les fiançailles, la cérémonie nuptiale. Aujourd’hui, ce parcours bourgeois et balisé est balayé par une synchronie visant à satisfaire en premier lieu les besoins affectifs des individus ».

Et là, les couples se perdent dans un flou émotionnel, dont on peut juste noter que tout le monde à l’impression d’être une victime…

CLAIRE : DONT ON NE PEUT PAS SORTIR … ?

Ça se tente ! Daniel Scheidermann et Chloé Delaume signent pour la dernière rentrée littéraire, une autofiction à deux, et ce n’est pas seulement cela qui est inédit. Dans ce roman d’amour, ils racontent combien leur couple repose sur l’acceptation de leurs différences fondamentales, et leur livre ressemble quasiment à un mantra : soulevez les problèmes du corps, les problèmes éthiques, les émotions, par écrits, ensemble, pour construire un couple solide et longue durée.

Si vous n’êtes pas littéraires, il vous reste les margharitas et les copines sous le perron comme dans la série télé Desperate Housewifes, pour tenter de noyer le désarroi, l’émotion qui persiste…