Contraception, quelles relations avec la sexualité ?
Claire Hedon/ Catherine Solano
Catherine, vous allez nous parler de contraception et de sexualité. Mais la contraception n’est-elle pas plutôt en relation avec la fertilité que la sexualité ?
-Non, pas du tout ! La contraception a une relation très profonde avec la sexualité. Parce que le but de la contraception, c’est de nous permettre de faire l’amour... sans faire de bébés. De faire l’amour avant tout. Sinon, finalement, il suffirait de ne pas faire l’amour et on n’aurait pas d’enfants et on n’aurait pas besoin de contraception. La contraception n’existe que parce que le désir sexuel est très puissant... Plus encore que celui de faire des enfants.
Définition du Dr Rik Van Lunsen (Amsterdam) : L’objectif de la contraception, est de permettre une activité sexuelle normale en n'entraînant seulement des grossesses désirées
Alors, la contraception permet de plus faire l’amour ?
-Evidemment oui ! La contraception a libéré la sexualité. On parle souvent de mai 68 en France qui a libéré les mœurs. Mais en réalité, il semble que ce soit plus l’apparition de la pilule qui ait entraîné des changements de comportements. Si la peur de la grossesse s’atténue, le désir augmente. C’est presque mathématique ; Car ce qui bloque souvent la sexualité, c’est la peur, quelle qu’elle soit.
La sexualité est donc plus épanouie avec la contraception ?
-Oui en partie. Oui car les couples sont libérés de la peur et ça c’est vraiment important dans un monde où l’on se sent une grande responsabilité vis-à-vis des enfants. Mais la contraception n’est pas encore totalement satisfaisante sexuellement.
Des enquêtes montrent les effets d’une contraception sur la satisfaction sexuelle générale des femmes (1) :
Voici les chiffres
- 57% des femmes stérilisées (ligature des trompes) sont satisfaites sexuellement.
- 44% des utilisatrices de la pilule le sont,
- 30% des utilisatrices des utilisatrices de stérilet,
- 11% des utilisatrices du préservatif.
Ces chiffres sont vraiment intéressants car il sont très peu connus ! On peut comparer les différentes contraceptions, mais voir que, à part chez les femmes stérilisées (mais ça concerne peu de femmes) la satisfaction sexuelle est généralement en dessous de 50 % ce qui est quand même assez bas.
Quels effets négatifs peut avoir la contraception sur la sexualité ?
-L’utilisation du préservatif est indispensable, mais il est parfois difficile pour les hommes. Seulement 11 % des femmes en sont satisfaites, et 72 % des hommes disent avoir eu une panne ou une baisse d’érection en le mettant en place. Du coup, pour eux, c’est stressant ! Ils ont souvent peur de ne pas être à la hauteur.
La pilule, n’entraîne pas les mêmes problèmes.
-Non, il y a nettement plus de femmes satisfaites par la pilule. Les difficultés sexuelles rencontrées sont très différentes. Mais elles sont tout de même fréquentes. Les difficultés sexuelles sont la cause numéro 1 de l’arrêt de la pilule (2).
Il y a 20 à 40 % des femmes sous pilule qui rapportent une perte du désir sexuel (pour 6,1 % une augmentation du désir). Et puis, il y a une disparition de la fluctuation du désir lié au cycle (pics de désir n’existent plus)
Cela veut dire que si l’on n’a plus de libido sous pilule, il faut changer de contraception ?
-Changer de contraception, oui, mais il suffit parfois de changer de type de pilule. Certaines pilules ont beaucoup moins d’action antidésir. Il y en a même qui ont tendance à donner de l’acné. Ce n’est pas agréable, mais c’est le signe qu’elles ne sont pas antidésir !
Et pour les autres contraceptions ?
-Pour la contraception définitive, ligature des trompes chez la femme ou des canaux déférents chez l’homme, il faut faire très attention à notre psychisme. Savoir qu’en faisant l’amour, on ne pourra plus jamais avoir d’enfant enlève une dimension très importante à l’acte amoureux... même quand on ne souhaite pas d’enfants. Alors, à la moindre réticence, il vaut mieux réfléchir plutôt que de se forcer à un acte définitif. Sinon, on voit des catastrophes sur le plan sexuel ou relationnel dans les couples.
Finalement, la contraception idéale n’existe toujours pas !
-Non, c’est vrai. On a l’impression qu’il y a beaucoup de solutions avec l’implant, l’anneau contraceptif, le patch, la pilule, les préservatifs, les spermicides... Mais s’il y a autant de choix c’est que la méthode efficace à 100 %, sans aucun risque pour la santé, qui ne gêne pas pendant l’acte sexuel, et bien, elle reste encore à découvrir !
FIN !
(1)Oddens et al 1997
(2)Van Lunsen et al proceedings ISSWSH 2004 et Bancroft 2000 (ensuite, en ordre, ce sont les saignements, la disposition mentale, la prise de poids, les problèmes de peau)
Claire Hédon, journaliste à RFI présente depuis 2003 une émission consacrée à la santé dans le monde :"Priorité Santé". Le but : faire de la prévention auprès du grand public, l’informer sur ses droits, sur les traitements et les moyens d’y accéder.
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