AGADIR 2012

 

Vous revenez d'Agadir, au Maroc, où vous coordonnez un diplôme universitaire de Diabétologie, de l'université Paris XIII - Bobigny. Comment est organisé cet enseignement, si éloigné de votre base de l'hôpital Avicenne ?

 

 

 
Il s'agit d'un partenariat original entre notre faculté et l'institut de formation Galien à Agadir, grande ville du sud marocain, qui commande une immense région de 1 million et ½ d'habitants, dépourvue de faculté de médecine, loin de Rabat et de Marrakech, mais par contre riche, si l'on peut dire, de sujets porteurs de diabète, peut-être plus de 10 % de la population...
 
Dans cette région on peut compter les spécialistes du diabète sur les doigts d'une seule main, mais grâce à ce diplôme universitaire, que nous avons créé et qui en est à sa troisième année, plus de 100 médecins généralistes sont venus se former, et peuvent prendre en charge avec beaucoup plus de connaissances, et donc de confiance en eux-mêmes, les nombreux diabétiques de tout âge qui fréquentent les centres de santé ruraux et urbains, ainsi que les cabinets de ville.
 
Il s 'agit d'un diplôme de Paris XIII, ces médecins, déjà diplômés de médecine générale au Maroc, prennent sur leur temps une centaine d'heures dans l'année pour participer à plusieurs modules d'une semaine où les spécialistes des hôpitaux Avicenne et Jean Verdier abordent tous les aspects du diabète, et de son traitement.
 
 
Mais les moyens dont dispose la santé au Maroc permettent-ils d'appliquer concrètement vos recommandations, et par exemple les médicaments modernes sont ils à la portée des malades ?
 
Notre enseignement poursuit deux objectifs : certes fournir à des confrères curieux et motivés un aperçu des récentes découvertes, mais aussi, et peut-être surtout, leur permettre de traiter leurs patients, même avec une palette limitée d'instruments thérapeutiques : au Maroc, et même dans des centres ruraux du bled, on peut disposer des deux grandes classes de médicaments antidiabétiques par voie orale, et des deux ou trois types d'insuline de base. Ce qui est fondamental c'est de s'en servir au mieux, avec des objectifs clairs, et de bien les expliquer au patient, même s'il est peu instruit. J'ai vu ainsi ces médecins reprendre confiance en leur capacité de prévenir les complications, suivre des grossesses de femmes diabétiques, traiter des enfants à l'insuline, etc.
J'ai vu aussi une dame, venant au dispensaire public de Taroudant, son carnet de surveillance à la main, montrer fièrement son résultat de glycémie...
 
Une minorité de la population est plus aisée et peut accéder à des médicaments plus coûteux, et surtout à des instruments de surveillance comme les appareils de mesure de la glycémie au doigt, et surtout à un examen ophtalmologique, les spécialistes dans ce domaine étant souvent inaccessibles aux démunis.
D'année en année nous constatons d'indéniables progrès de l'accès des populations pauvres à des soins de qualité, même si beaucoup reste à faire...
 
 
 
Pourquoi y a-t-il tant de diabétiques au Maroc ? Est-ce là comme ailleurs un effet de l 'épidémie d'obésité ?
 
En grande partie c'est effectivement la conséquence de l'excès de poids, lui même sous tendu par la diminution de l'activité physique, la prise de sodas sucrés, l'exode rural... des facteurs génétiques, mais aussi culturels, jouent également un rôle, par exemple dans certaines populations nomades il existe une valorisation du poids chez les femmes !
 
Nous avons d'ailleurs créé un deuxième diplôme universitaire à Agadir, celui de Nutrition, pour répondre à la demande des médecins soucieux de mieux comprendre cette discipline et de mieux conseiller les patients.
 Ecouter la chronique du Pr Alain Krivitzky:
 

 

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