suppléments vitaminiques et mortalité 21/10/2011

Suppléments vitaminiques et oligo-éléments : plus dangereux qu’utiles ?

 

 

Les aliments enrichis, les compléments vitaminiques, les oligo-éléments occupent de plus en plus de place dans les revues, les publicités, et les rayons des pharmacies, parapharmacies et grandes surfaces. 

Des sommes importantes sont consacrées à l’achat de ces compléments nutritionnels  divers : le service sanitaire rendu est-il à la hauteur de cet investissement ?

 

Les bénéfices pour la santé d’une alimentation équilibrée sont reconnus depuis longtemps. Que l’on évoque le « régime crétois » ou bien, aux Etats-Unis « la DASH diet », le fait de consommer poisson, fruits, légumes verts et légumes secs, noix et noisettes, fibres, graisses non saturées, un peu de laitages…et un verre de vin au repas, est très bénéfique en terme de prévention des maladies cardio-vasculaires, du diabète et du cancer.

Une telle alimentation apporte la quantité nécessaire et suffisante de vitamines et de minéraux. On sait que chez la femme enceinte, un supplément  de fer et de vitamine B9 (ou acide folique) sont souhaitables ; chez la personne âgée un complément de vitamine D et de calcium également.

A partir de ces données, et des troubles reconnus provoqués par les carences et déficiences alimentaires si fréquentes dans de nombreuses régions du monde et dans la population précarisée des pays riches, on a convaincu les bien portants d’ajouter à leur alimentation divers compléments : complexes vitaminiques, oligoéléments, oméga 3, sans parler de produits stimulants ou énergisants, acides aminés, ginseng, sans aller jusqu’à la corne de rhinocéros…

 

 

Certes on peut concevoir que ces compléments sont coûteux et inutiles, mais ils peuvent au moins avoir un effet psychologique favorable, un effet placebo, sans présenter de risque particulier ?

 

Sans doute dans la plupart des cas ils enrichissent le fabricant sans nuire à la santé du consommateur. Néanmoins il faut savoir qu’ils ne sont pas soumis aux mêmes contrôles de qualité et d’innocuité que les médicaments proprement dits, (même si l’on a vu que ces garanties n’étaient pas toujours présentes dans ce cas !), et que la composition et les effets secondaires éventuels d’une surconsommation ne sont pas, ou pas clairement, précisés.

Surtout, des études scientifiques récentes, études contrôlées sur de nombreux consommateurs, suivis sur de longues périodes, viennent contester le caractère somme toute inoffensif de la consommation régulière de complexes vitaminiques et de minéraux, consommation non justifiée par une carence ou par un état pathologique particulier.

Ainsi une revue américaine de premier plan, « Archivs of Internal Medicine », vient de publier une grande étude tirée de l’ « Iowa Women’s Health Study », sur la mortalité comparée des personnes consommatrices et non consommatrices de ces suppléments dans cet état du Middle West.

On sait que les USA sont pionniers dans ce domaine des compléments, par exemple 85% en consomment au moins un chaque jour, et 27% au moins 4 différents par jour.

L’étude a démarré en 1986, sur près de 42.000 femmes de 55 à 69 ans. Avec des questionnaires écrits, précis, sur leur état de santé, leur activité physique, leurs maladies, leur alimentation et sur la prise régulière de compléments : toutes les vitamines, le fer, le calcium, le cuivre, le zinc, le sélénium, le magnésium…

Les mêmes questions ont été reposées en 1997 et 2004. Les décès et leur cause ont été comptabilisés.

Globalement ces compléments pris régulièrement pendant plus de 20 ans n’ont apporté, sauf le calcium, aucun bénéfice en terme de baisse de la mortalité par rapport aux non consommateurs ce qui est quand même le critère majeur des études épidémiologiques !

 La mortalité par maladie cardio-vasculaire, par cancer, ou par une autre cause n’a pas été réduite.

La prise répétée non justifiée de complexes vitaminiques, de fer, de cuivre, de zinc, et de magnésium s’est même montrée légèrement défavorable sur la mortalité, et ceci après la prise en compte statistique de l’ensemble des données de l’état de santé des personnes.

 

 

Cette étude remet en cause bien des notions considérées comme acquises… Doit-on à votre avis se méfier désormais des compléments vitaminiques et minéraux ?

 

Non, car ils restent utiles ou indispensables en cas de carence réelle.

Mais chez les sujets bien portants et correctement nourris leur usage quotidien est au mieux superflu, et éventuellement il est à déconseiller.

Nous manquions jusqu’ici de telles études contrôlées,  sur une population nombreuse, avec un recul important.

C’est encore l’occasion d’insister sur la valeur de règles alimentaires saines et simples, même si, malheureusement, tout le monde n’y a pas accès.

 

 

Alain Krivitzky, RFI, 21 octobre 2011.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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