13 nov. 2009 - 15:46
Notre Université Paris XIII et sa faculté de médecine de Bobigny viennent de créer un Diplôme Universitaire de diabétologie à l'intention des médecins d'Agadir, et avec mon collègue Gérard Reach, chef du service d'endocrinologie-diabétologie de l' hôpital Avicenne, nous venons d'en assurer le premier module.
Mais Agadir est une grande ville, n'y a-t-il pas sur place les possibilités de formation post universitaire pour les médecins ?
Agadir est une ville de plus de 400.000 habitants, c' est le chef lieu d'une vaste région à la fois montagneuse et parfois semi-désertique, avec une population de plusieurs millions d'habitants. Il n'y a pas de faculté de médecine, celles de Rabat et de Marrakech sont lointaines. Les médecins généralistes ne disposent pas des moyens ou du temps suffisants pour aller compléter leur formation. Les spécialistes y sont peu nombreux, seulement 3 diabétologues par exemple pour toute la région.
Comment a pu se constituer un projet entre la faculté de Bobigny et les médecins d'Agadir?
La préoccupation de santé publique est très présente au Maroc. De nombreux médecins exercent en centre de santé, d'autres s'installent en privé, tous sont très demandeurs à la fois d'être au courant des progrès dans la connaissance et le traitement du diabète, dont ils constatent comme ailleurs la véritable explosion épidémique, et d'améliorer leur pratique, et ceci même si tous les moyens de diagnostic et de traitement du diabète ne sont pas encore accessibles à la majorité de leurs patients.
Il existe à Agadir un institut de formation en santé publique, l'Institut Galien, dont les diplômes sont validés selon les critères les plus stricts par les autorités marocaines: cet institut forme depuis plusieurs années des para-médicaux : infirmières, aides soignants, kinésithérapeutes, et aussi des aides pharmaciens. Il a étendu plus récemment cet enseignement à la gestion des établissements de santé : c'est à ce titre que l'université Paris XIII a assuré formation et validation de futurs responsables de structures de santé. Puis est venue l'idée d'une formation post universitaire en diabétologie, et qu'il nous a été demandé d'imaginer les thèmes et l'organisation d'un diplôme universitaire dans ce domaine.
Ces médecins sont donc retournés en cours, est-ce compatible avec leur surcharge de travail ?
Il s'agit de plusieurs modules de 20 heures occupant les matinées pendant une semaine, les prochains modules sont prévus au rythme d'un tous les mois et ½ environ. Les médecins sont cinquante, extrêmement assidus, attentifs, et, j'en conviens, beaucoup plus motivés que nos propres étudiants : c'est un plaisir de faire cours dans ces conditions. Ils paient des droits d'inscription, certains d'entre eux sont aidés, n'ayant que peu de moyens.
Cet enseignement vous a-t-il permis d'apprécier la prise en charge du diabète à Agadir et sa région?
Il a été l'occasion pour nous de connaître des conditions d'exercice et de prise en charge qui évoluent, même si par exemple la possibilité d'un examen des yeux annuel par un ophtalmologiste est pour l'instant irréaliste. De même la surveillance quotidienne du taux de sucre au niveau du doigt par le patient diabétique lui-même n'est accessible qu'à 20% d'entre eux, et les nouvelles insulines ou les nouveaux médicaments en comprimés à seulement une petite minorité fortunée.
Mais avec les moyens existants et la volonté de les utiliser au mieux ces généralistes « font déjà très bien » et attendent de cette formation de progresser encore. On peut leur faire confiance.
Alain Krivitzky, RFI, 13 novembre 2009