Cancer et sexualité

 

Claire : L’annonce d’une maladie comme un cancer entraîne des répercussions sur la santé, mais aussi sur la famille, l’environnement, le travail, le psychisme, et même sur la sexualité. Catherine va nous parler de cet aspect. Un cancer, est-ce toujours une difficulté pour la sexualité ?

 

Catherine : Pas toujours. Quelquefois, un cancer peut avoir un effet positif. Je me souviens d’un jeune couple qui avait d’importantes difficultés sexuelles. Ils avaient une trentaine d’année et vivaient ensemble depuis plusieurs années. Ils n’envisageaient pas d’avoir d’enfant dans l’immédiat. Et puis, suite à un frottis vaginal, on a découvert chez cette jeune femme un cancer à un stade débutant. En quelques jours, tout a changé pour eux. Ils ont réalisé qu’ils avaient envie d’avoir un enfant tout de suite et se sont demandé pourquoi, alors qu’ils étaient heureux, qu’ils s’aimaient, qu’ils avaient un bon travail, ils reculaient sans cesse le moment de faire un enfant. Ce cancer leur a permis de mettre l’accent sur l’essentiel. Et a eu un effet très positif aussi sur leur sexualité.
 
Claire : Le plus fréquent des cancers chez les femmes, c’est le cancer du sein. Quelles répercussions a-t-il sur la sexualité ?
 
Catherine :Les répercussions sont de plusieurs ordres. Le premier, c’est que ce cancer atteint un organe qui joue un rôle dans la séduction. Une femme peut se sentir moins désirable ou plus du tout désirable avec un sein malade.Cela peut jouer considérablement sur son désir.
Quand on doit opérer pour enlever un sein, l’image du corps est atteinte. C’est difficile à accepter. Il faut toujours un temps pour s’habituer, adopter de nouveau corps et l’apprécier malgré tout. D’ailleurs, même si la chirurgie réparatrice est possible, il existe pas mal de femmes qui refusent la réparation. Elles préfèrent que leur corps soit aussi un témoin de leur histoire. Et visiblement, cela gêne souvent moins leur partenaire qu’on pourrait le croire.
Et enfin, les traitements pour les cancers du sein peuvent entraîner des difficultés sexuelles. La chimiothérapie, parfois, entraîne une ménopause prématurée par exemple. Les traitements peuvent déclencher une sécheresse vaginale…
 
Claire : Le cancer de l’utérus ?
 
Catherine : Le cancer du col de l’utérus est dépisté par un frottis réalisé pendant un examen gynécologique. Quand il est pris à temps, il permet de garder une vie sexuelle normale et d’avoir des enfants. Quand le cancer est plus avancé, il est parfois détecté à cause d’un saignement lors des relations sexuelles. Il concerne le col de l’utérus ou le corps de l’utérus, la femme opérée, à qui on enlève l’utérus ne pourra plus avoir d’enfants. Sa fertilité est donc en jeu. Mais sa sexualité peut continuer à fonctionner, avec quand même souvent des troubles sexuels dus aux effets indésirables des traitements.
 
Claire : Et chez les hommes, le cancer qui peut toucher la sexualité, c’est le cancer de la prostate… Quelles sont ses incidences ?
 
Catherine : Tout dépend du traitement mis en œuvre. Parce que ce sont les traitements qui peuvent être agressifs pour la sexualité plus que la maladie elle-même.
Quand c’est la chirurgie, l’opération consiste à ôter entièrement la prostate. C’est la prostatectomie radicale. Les hommes opérés ne peuvent plus éjaculer puisque le chirurgien coupe la voie par où passe normalement le sperme.
Lors de cette intervention, de nos jours, les chirurgiens font tout pour préserver les nerfs érecteurs quand c’est possible. Ainsi, environ 50 % des hommes peuvent récupérer une érection spontanée par la suite. Mais 50 % des hommes ne retrouvent pas cette érection spontanée. Avec le traitementcuriethérapie ou radiothérapie, quand le cancer est pris suffisamment tôt, les troubles sexuels sont souvent moins fréquents et ils apparaissent plus progressivement.
Le troisième traitement du cancer de la prostate, c’est le traitement hormonal, qui fait chuter le désir sexuel.
Pour retrouver une érection et avoir des possibilités de relations sexuelles, les hommes peuvent bénéficier de plusieurs traitements qui vont des médicaments en comprimés, en injection dans le pénis, aux vacuum (pompe à érection) ou à l’implant pénien.
 
Claire : Et sur le plan psychologique ?
 
Catherine : Le cancer confronte à l’idée de la mort. La sexualité peut alors être très importante et représenter une énergie de vie. « Je fais l’amour, donc je suis vivant(e) ». C’est pourquoi parler de sexualité quand on a un cancer, c’est peut-être très important. C’est le côté positif que peut jouer la sexualité à ce moment.
Mais cette maladie peut aussi entraîner des angoisses et une dépression qui bloque le désir sexuel de la personne atteinte par le cancer.
Et comme la sexualité se fait à deux, le ou la partenaire peut se trouver angoissée, avoir peur de faire mal ou de mal faire. Par moments la personne malade peut avoir l’impression que son ou sa partenaire s’éloigne. Le plus souvent, ce n’est pas du désamour. C’est plutôt de l’angoisse, une peur de ne pas être à la hauteur, un sentiment d’impuissance face à l’aide que l’on voudrait apporter sans trop savoir que faire. Et même si cela peut paraître bizarre, c’est important de soutenir les partenaires de personnes malades, pas seulement les malades eux-mêmes. C’est d’ailleurs vrai pour les cancers comme pour toutes les maladies graves ou chroniques. En effet, le conjoit en bonne santé se dit « je n’ai pas à me plaindre, je dois tenir le coup ». Et ce n’est pas forcément facile, et les angoisses qu’il garde retentissent sur le lien amoureux et la sexualité. Alors, trouver du soutien de l’entourage ou d’un psy peut être très important pour faire face à deux et conserver une proximité intime.
 
Ecoutez la chronique du Dr Catherine Solano:
 

 

0 Comments

Poster un nouveau commentaire

Le contenu de ce champ ne sera pas montré publiquement.
CAPTCHA
Cette question vous est posée pour vérifier si vous êtes un humain et non un robot et ainsi prévenir le spam automatique.