Comment mieux communiquer sur la sexualité dans un couple ?

 

On entend de plus en plus parler de sexualité dans les médias. Et pourtant, Catherine, vous constatez que la communication intime reste toujours assez difficile dans les couples. Pourquoi ?

 

 

 
Catherine : Sans doute parce que la sexualité contient une partie de nous qui est notre animalité sexuelle. C’est le lieu de pulsions, de désirs violents et comme nous vivons en société, nous avons plutôt appris à être polis, bien élevés. Et avec la personne que nous aimons, nous avons du mal à montrer cette partie de nous. Elle nous fait un peu peur et nous avons peur d’effrayer l’autre, ou de nous montrer sous un jour qui ne lui plaise pas. Pourtant, l’autre est dans la même situation que nous et nous ressemble plus qu’on ne le pense peut-être.
 
Claire : Comment faire pour améliorer la communication sexuelle ?
 
Catherine : Ne pas seulement s’occuper de l’autre, mais aussi de soi. Prenons un exemple. Une femme ressent un désagrément dans une position. Cela lui fait un peu mal. Elle n’ose pas le dire car elle sent que son partenaire a du plaisir et elle veut lui faire plaisir. Alors, elle prend sur elle. Et bien, c’est une mauvaise habitude.
Si au contraire cette femme dit à l’autre : « Ecoute, je ne me sens pas bien dans cette position, peut-on en changer ? Son partenaire l’acceptera a priori, et en plus, il saura qu’elle prend soin d’elle-même. Que si elle ressent une douleur, une gêne ou un inconfort, elle l’exprimera. Il sera donc plus libre de profiter de son plaisir. Il ne risque pas d’être avec une femme qui un jour lui dit « tu me fais souvent mal, tu n’es pas attentionné ! » Il est important de penser à son propre confort et à son propre plaisir. Parce que l’autre ne peut vous apporter ce que vous ne demandez pas. Il ne peut pas prendre soin de vous si vous ne réclamez jamais.
 
Claire : En pratique, quand on a une remarque à faire à l’autre, et pas forcément agréable, comment la formuler ?
 
Catherine : Avant de parler de remarques désagréables, il faut dire qu’il est essentiel de faire des remarques agréables ! Si vous complimentez l’autre régulièrement, il sera bien plus facile pour votre partenaire d’accepter une remarque négative. Parce qu’il se sentira globalement apprécié. Si vous ne faites jamais de compliments, et bien les critiques vont être très difficiles à recevoir. Et je parle de compliments en général et de aussi compliments sexuels. Dire « J’aime tes caresses. » ou « Aujourd’hui, tu m’as embrassé très doucement, c’était très agréable pour moi », ou « j’ai bien aimé cette position qui me procure beaucoup de sensations… »
J’insiste, un collègue disait que pour qu’une remarque négative passe bien, il faut avoir fait auparavant 100 remarques positives. Alors, faites des provisions pour avoir de la marge !
 
Claire : et quand vraiment, on a quelque chose à dire de négatif ? Comment l’exprimer ?

Catherine : En pratique, quand on fait une remarque négative, il ne faudrait pas dire TU. « Tu me fais mal » ou « Tu ne me caresses pas bien » etc. Il faut plutôt dire ce que l’on ressent en disant JE. « J’ai mal dans cette position », ou « J’aime bien que telle caresse plutôt appuyée, mais j’apprécie moins quand elle est plus légère parce que ça me chatouille à cet endroit… » Ou « J’ai du mal à supporter les caresses sur mon sexe après l’orgasme »… Il ne faut pas que la remarque soit reçue comme un jugement, mais comme une ouverture de sa propre intimité à l’autre.

Claire : Pourriez-vous nous donner des conseils pratiques qui aideraient à communiquer plus facilement ?
 
Catherine : Une chose peut être intéressante. C’est de parler après l’amour (si on ne s’endort pas tout de suite !) Comme pour faire un bilan. Mais un bilan de ce que l’on a aimé.Poser une question comme : Qu’est-ce que tu as préféré aujourd’hui ?Et peut-être que l’autre va dire « C’est quand on se regardait dans les yeux pendant les mouvements de va-et-vient. » Ou « C’est quand tu as gémi au moment où je te caressais… » Ou tout autre chose bien sûr. Faire cet exercice régulièrement permet d’être plus à l’aise avec l’intimité, et de se sentir bien plus proches. Parce que, bizarrement, pendant l’amour, on peut par moments ne pas se sentir proches. Et vous verrez, si vous pratiquez cet exercice, il est parfois aussi agréable que faire l’amour. Parce qu’un des rôles de la sexualité, c’est de créer des liens. En s’ouvrant mutuellement dans nos intimités, nous consolidons notre relation. Et puis, cela vous permet aussi de connaître l’autre de mieux en mieux. De vous adapter dans votre sexualité au fil du temps pour qu’elle devienne meilleure.
 
Claire : mais on peut aussi faire le bilan de ce qui va moins bien ?
 
Catherine : Bien sûr. On peut aussi poser la question : Qu’est-ce que tu aimes le moins quand on fait l’amour ? Qu’est-ce que tu aimerais changer ? Notez qu’il ne s’agit pas de s’affirmer en balançant ce qui ne va pas, mais de demander à l’autre ce qu’il a à dire. On se met en posture d’écoute, pas de revendication.
 
Claire : Et si l’autre réclame quelque chose qui ne nous plait pas ? On fait quoi ?
 
Catherine : On l’écoute. C’est déjà très important d’avoir un espace où l’on peut se confier l’un à l’autre. Même si l’on n’est pas sur la même longueur d’onde. On peut très bien répondre : je comprends ce que tu me dis, j’entends ce que tu me dis. Et moi, je vais te donner mon point de vue qui est différent. De toutes manières, on ne sera jamais d’accord sur tout à 100 %. Mais si on peut déjà se comprendre, cela rapproche beaucoup. Je prends un exemple.
Une femme qui dit :
« Tu as envie de faire l’amour devant un miroir. Je comprends que ça puisse être excitant pour toi. Mais moi, pour l’instant, je ne m’en sens pas capable. »
Ce n’est pas du tout la même chose si elle dit : « Faire l’amour devant un miroir ? Non, c’est hors de question, c’est une idée bizarre ; je trouve ça dégoûtant. Tu ne serais pas un peu pervers ? »
Se sentir accepté par l’autre, même dans les différences, c’est important.
 
Ecoutez la chronique du Dr Catherine Solano:
 
A lire : Un excellent livre sur le sujet : « Petit guide du plaisir complice, la communication intime dans le couple » De Carolle et Serge Vidal-Graf. Aux éditions poche Jouvence.

 

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