Les faux médicaments

 

Claire : Igor, vous êtes au Burkina Faso ou ont lieu les 27 et 28 septembre des tables rondes pour lutter contre les faux médicaments. Qui participe à cet évènement ?

 

 

  
Igor : Il y a beaucoup de monde puisqu’il y a plus de 200 personnes présentes ici pour élaborer une stratégie commune de lutte contre les faux médicaments.
Hier c’est le président de la république en personne, Blaise Compaoré qui a inauguré ces tables rondes, c’est dire l’importance de l’évènement ici au Burkina Faso.
Alors on retrouve tous les acteurs concernés par cette lutte contre les faux médicaments. Le ministre de la santé du Burkina Faso. Des membres du ministère de la santé du Sénégal et du Ghana.
Des représentants du ministère français des affaires étrangères, le professeur Gentilini de la fondation Chirac. Il y a aussi d es représentants de l’OMS, le président de l’intersyndicale des pharmaciens d’Afrique, de nombreux laboratoires sont également présent.
Et puis comme il s’agit d’un vaste trafic international, on retrouve un représentant d’interpol, l’organisation internationale de Police, et l’OMD  l’organisation mondiale des douanes….
Bref beaucoup de monde ici.
 
 
Claire : Concrètement Igor quel est le but de ces tables rondes ? Quelles sont les solutions pour lutter contre ce trafic de faux médicaments ?
 
 
Igor : C’est vraiment de mener une action conjointe en Afrique de l’ouest contre les faux médicaments. Vous savez qu’en 2009 Un rapport de l’ONUDC, l’office des nations unis contre la drogue et le crime, a montré que l’Afrique de l’ouest était devenue une plaque tournante des faux médicaments. Selon le directeur de l’ONUDC, 50 % des médicaments utilisés en Afrique de l’ouest seraient des faux. Alors ce chiffre baisse d’après les estimations de l’OMS, l’organisation mondiale de la santé qui parle de 30% de faux médicaments. Il faut dire qu’est très difficile d’évaluer précisement ce trafic.
Mais toujours pour rester dans les chiffres, les anti paludiques trafiqués, par exemple seraient responsables d’environ 200.000 morts par an sur le continent c’est énorme.
Pour lutter contre ce fléau, il faut déjà que l’OMS intègre le terme de « médicaments falsifié ». La France milite en ce sens car en ce  moment il n’existe pas d’accord entre les Etats sur la définition des faux médicaments. Quand on parle de faux médicaments, on parle de différentes choses. Les vrais médicaments qui sont mal conservés en plein soleil et qui deviennent donc inéfficaces. Les faux médicaments qui sont en fait de l’amidon ou du mil etc… donc qui ne guérissent pas mais ne sont pas dangereux en soi.
Mais il y a aussi les médicaments sous dosés ou surdosés qui eux sont dangereux car ils peuvent provoquer des résistances à la maladie et donc la mort.
Et puis il y a  les véritables poisons…..vous savez qu’on a retrouvé de la peinture de marquage routier, du cirage ou de l’arsenic dans certains faux médicaments.
Donc il faut déjà s’entendre sur une définition commune.
 
Evidemment il faut améliorer le contrôle qualité des médicaments, or il n’y a pas de laboratoires de contrôle du médicament digne de ce nom en Afrique de l’ouest.
Il faut impérativement baisser le cout des médicaments pour qu’ils soient accessibles aux plus grand nombre.
Et la c’est les laboratoires qui sont directement concernés.
Une grande mobilisation de la police et du système douanier est également fondamentale.
Il faut faire de la sensibilisation tout en renforcant l’arsenal repressif et réfléchir à l’insertion des vendeurs à la sauvette.
.
 
Vous le voyez il y plusieurs axes de reflexions pour lutter contre ce trafic.
 
 
Claire : Alors Igor on a tous en mémoire les propos de l’ancien président Jacques Chirac, lors de l’appel de Cotonou du 12 octobre 2009 en présence de plusieurs présidents africains. Est-ce que les choses ont évolué depuis ?
 
 
 
Igor : Alors pour la petite histoire l’appel de Cotonou a failli être l’appel de Ouagadougou puisque cette réunion devait à l’origine avoir lieu au Burkina Faso.
Plus sérieusement, oui les choses ont bougé.
Pour lutter éfficacement contre les faux médicaments il faut déjà un engagement politique fort. Certains présidents ont montré qu’ils avaient la volonté de lutter contre ce problème de santé publique. Déjà on en parle beaucoup plus, et il y a donc une prise de conscience générale. Je me suis promené dans les rues de Ouagadougou et les habitants me disaient qu’il y avait beaucoup moins de vendeurs à la sauvette dans les rues. Ils se cachent.Ca ne veut pas dire qu’ils n’existent plus, ils sont encore très nombreux dans les campagnes ou aux abords de Ouagadougou mais c’est plus discret et il n’y a plus ce sentiment d’impunité.
Suite a l’appel de Cotonou Le conseil de l’europe a préparé  une convention appelée médicrime qui criminalise la contrefaçon de produit de santé. Concrètement cela signifie que l’arsenal répressif a été renforcé. Désormais les trafiquants risquent une peine de 5 ans de prison et jusqu’à 500.000 euros d’amendes. Donc oui la situation a évolué, maintenant il faut que toutes ces bonnes paroles deviennent des actes concrets sur le terrain, et ça risque de prendre du temps.
 
 
Claire : Oui et on imagine que l’argent va être au cœur de cette lutte.
 
 
Igor : Oui ca va être le nerf de la guerre. Vous savez que le trafic de faux médicaments est un marché très rentable, on parle de sommes dépassant les 50 milliards d’euros. C’est considérable. Bientôt ce trafic pourrait dépasser celui de la drogue. Aujourd’hui le trafic de drogue se porte très bien malgré les sommes dépenser pour lutter contre ce trafic. Le risque c’est qu’il en aille de même avec le trafic de médicaments. Les dealers sont très bien organisés, il y a de véritables mafias qui ne reculent devant rien. Les risques sont bien moindre que pour le trafic de drogue. C’est pour cela qu’il faut vraiment une action commune.
C’est le but de ces tables rondes à Ouagadougou. Nous verrons plus tard si cela a porté ses fruits.
Ecoutez la chronique de Igor Strauss:

 

0 Comments

Poster un nouveau commentaire

Le contenu de ce champ ne sera pas montré publiquement.
CAPTCHA
Cette question vous est posée pour vérifier si vous êtes un humain et non un robot et ainsi prévenir le spam automatique.